HLP cours de première
Cours spécial pour
Le programme de la spécialité HLP en première
Semestre 1 les pouvoirs de la parole
Support de cours : textes & devoirs
Supports iconographiques et vidéo de la séquence
Le discours judiciaire
Les avocats au prétoire vus par Honoré Daumier
Les avocats à la cour d'assise
(v.1830-1840)
L'avocat peut-il défendre l'indéfendable?
Cicéron contre Verrès et Catilina
Ci-dessus: statue de Cicéron au Palais de Justice-Cour de cassation de Rome.
Le réquisitoire de Robert BADINTER contre la peine de mort (1981)
la parole argumentative
Antigone contre Créon chez SOPHOCLE
CRÉON
Et tu as osé transgresser mes lois ?
ANTIGONE
Ce n'est pas Zeus qui les avait proclamées,
Ni la Justice qui siège à côté de Dieux infernaux ;
Ce ne sont pas ces lois qu'ils ont fixées pour les hommes :
Et je ne pensais pas que tes proclamations fussent assez fortes
Pour permettre à un homme, à un simple mortel,
De transgresser les lois non écrites et immuables des Dieux.
Elles ne datent ni d'aujourd'hui, ni d'hier, Elles sont toujours
En vigueur, et nul ne sait depuis quand elles existent.
Je n'allais, pas moi, céder à la crainte qu'inspire un homme,
Quel qu'il soit, et avoir à en répondre devant les Dieux ;
Je savais qu'il me fallait mourir - comment l'ignorer ? -
Même si tu n'avais fait aucune proclamation. Si je meurs
Avant mon heure, je dis que j'ai tout à y gagner ;
Quiconque est plongé dans d'innombrables malheurs
Durant sa vie, comment n'aurait-il rien à gagner en mourant ?
Pour ma part, subir un tel sort, cela ne représente pour moi
Aucune souffrance ; mais si j'avais accepté qu'un enfant
Né de ma mère soit à sa mort privé de sépulture,
C'eût été pour moi une souffrance ; ceci n'en représente aucune.
S'il te semble que je commets une folie,
Il se peut que je sois traitée de folle par un fou.
La rhétorique argumentative
Le discours oratoire (selon Cicéron)
Un exemple de discours efficace: Dominique de Villepin, 2003 à l'ONU
le plaidoyer du Ministre des Affaires étrangères de la France à l'ONU en faveur de la paix
La parole comme arme
JP SARTRE
"L'écrivain engagé sait que la parole est action ; il sait que dévoiler, c'est changer et qu'on ne peut dévoiler le monde qu'en projetant de le changer…Il sait que les mots sont des pistolets chargés."
Simone VEIL: éloge des Justes (2007)
La parole séductrice
La parole d'autorité, le discours magistral
REMBRANDT, La leçon d'anatomie (1632)
Question d'interprétation: comment la parole magistrale est-elle ici valorisée?
La parole trompeuse: MOLIERE, Dom Juan (1665)
Extrait de l'acte II sc. 4
CHARLOTTE, à Dom Juan. Dites.
MATHURINE, à Dom Juan. Parlez.
DOM JUAN, embarrassé, leur dit à toutes deux. Que voulez-vous que je dise ? Vous soutenez également toutes deux que je vous ai promis de vous prendre pour femmes. Est-ce que chacune de vous ne sait pas ce qui en est, sans qu’il soit nécessaire que je m’explique davantage ? Pourquoi m’obliger là-dessus à des redites ? Celle à qui j’ai promis effectivement n’a-t-elle pas en elle-même de quoi se moquer des discours de l’autre, et doit-elle se mettre en peine, pourvu que j’accomplisse ma promesse ? Tous les discours n’avancent point les choses ; il faut faire et non pas dire, et les effets décident mieux que les paroles. Aussi n’est-ce rien que par là que je vous veux mettre d’accord, et l’on verra, quand je me marierai, laquelle des deux a mon cœur. (Bas à Mathurine.) Laissez-lui croire ce qu’elle voudra. (Bas, à Charlotte.) Laissez-la se flatter dans son imagination. (Bas à Mathurine.) Je vous adore. (Bas, à Charlotte.) Je suis tout à vous. (Bas à Mathurine.) Tous les visages sont laids auprès du vôtre. (Bas, à Charlotte.) On ne peut plus souffrir les autres quand on vous a vue. J’ai un petit ordre à donner ; je viens vous trouver dans un quart d’heure.
CHARLOTTE, à Mathurine. Je suis celle qu’il aime, au moins.
MATHURINE. C’est moi qu’il épousera.
Limites de la parole et limites rhétorique
les admettre
Les détecter, pour quoi faire?
l'art du pathos ou quand toute la conviction repose sur de la persuasion:
l'affirmation du conséquent / sophisme de la fausse cause :
Les "stratagèmes" rhétoriques selon (Schopenhauer via) la linguiste Laelia VERON
Ou comment connaître les ressorts de la rhétorique pour se libérer des emprises
Autre exemple de manipulation rhétorique, la tautologie :
La parole qui trahit et révèle:
RACINE, Phèdre (1677), acte II sc.5
HIPPOLYTE
Je vois de votre amour l'effet prodigieux.
Tout mort qu'il est, Thésée est présent à vos yeux ;
Toujours de son amour votre âme est embrasée.
PHÈDRE
Oui, Prince, je languis, je brûle pour Thésée.
Je l'aime, non point tel que l'ont vu les enfers,
Volage adorateur de mille objets divers,
Qui va du dieu des morts déshonorer la couche ;
Mais fidèle, mais fier, et même un peu farouche,
Charmant, jeune, traînant tous les cœurs après soi,
Tel qu'on dépeint nos dieux et tel que je vous vois.
Il avait votre port, vos yeux, votre langage,
Cette noble pudeur colorait son visage
Lorsque de notre Crète il traversa les flots,
Digne sujet des vœux des filles de Minos.
Que faisiez vous alors ? Pourquoi, sans Hippolyte,
Des héros de la Grèce assembla-t-il l'élite ?
Pourquoi, trop jeune encor, ne pûtes-vous alors
Entrer dans le vaisseau qui le mit sur nos bords ?
Par vous aurait péri le monstre de la Crète,
Malgré tous les détours de sa vaste retraite.
Pour en développer l'embarras incertain,
Ma sœur du fil fatal eût armé votre main.
Mais non, dans ce dessein je l'aurais devancée :
L'amour m'en eût d'abord inspiré la pensée.
C'est moi, Prince, dont l'ultime secours
Vous eût du labyrinthe inspiré les détours.
Que de soins m'eût coûtés cette tête charmante !
Un fil n'eut point assez rassuré votre amante.
Compagne du péril qu'il vous fallait chercher,
Moi-même devant vous j'aurais voulu marcher,
Et Phèdre au labyrinthe avec vous descendue
Se serait avec vous retrouvée, ou perdue.
HIPPOLYTE
Dieux ! qu'est-ce que j'entends ? Madame, oubliez-vous
Que Thésée est mon père et qu'il est votre époux ?
Extrait de la mise en scène de Luc BONDY (2007), avec Valérie DREVILLE dans le rôle-titre:
Etude du double langage de Phèdre:
LACLOS, Les liaisons dangereuses (1782) lettre 56 de la Présidente de Tourvel au Vicomte de Valmont
Question d'interprétation: en quoi cette lettre de rupture est-elle ambiguë ?
À quoi vous servirait, Monsieur, la réponse que vous me demandez ? Croire à vos sentiments ; ne serait-ce pas une raison de plus pour les craindre ? et sans attaquer ni défendre leur sincérité, ne me suffit-il pas, ne doit-il pas vous suffire à vous-même, de savoir que je ne veux ni ne dois y répondre ?
Supposé que vous m'aimiez véritablement (et c'est seulement pour ne plus revenir sur cet objet, que je consens à cette supposition), les obstacles qui nous séparent en seraient-ils moins insurmontables ? [...] Cessez donc, je vous en conjure, cessez de vouloir troubler un coeur à qui la tranquillité est si nécessaire ; ne me forcez pas à regretter de vous avoir connu.
Chérie et estimée d'un mari que j'aime et respecte, mes devoirs et mes plaisirs se rassemblent dans le même objet. Je suis heureuse, je dois l'être. S'il existe des plaisirs plus vifs, je ne les désire point. Je ne veux pas les connaître. En est-il de plus doux que d'être en paix avec soi-même, de n'avoir que des jours sereins, de s'endormir sans trouble, et de s'éveiller sans remords ? Ce que vous appelez le bonheur, n'est qu'un tumulte des sens, un orage des passions dont le spectacle est effrayant, même à le regarder du rivage. Eh ! comment affronter ces tempêtes ? comment oser s'embarquer sur une mer couverte des débris de mille et mille naufrages ? Et avec qui ? Non, Monsieur, non je reste à terre ; je chéris les liens qui m'y attachent. Je pourrais les rompre que je ne le voudrais pas ; si je ne les avais, je me hâterais de les prendre.
Pourquoi vous attacher à mes pas ? pourquoi vous obstiner à me suivre ? Vos Lettres, qui devaient être rares, se succèdent avec rapidité. Elles devaient être sages, et vous ne m'y parlez que de votre fol amour. Vous m'entourez de votre idée, plus que vous ne le faisiez de votre personne. Écarté sous une forme, vous vous reproduisez sous une autre. Les choses qu'on vous demande de ne plus redire, vous les redites seulement d'une autre manière. Vous vous plaisez à m'embarrasser par des raisonnements captieux ; vous échappez aux miens. Je ne veux plus vous répondre, je ne vous répondrai plus. Et comme vous traitez les femmes que vous avez séduites ! avec quel mépris vous en parlez ! Je veux croire que quelques-unes le méritent : mais toutes sont-elles donc si méprisables ? Ah ! sans doute, puisqu'elles ont trahi leurs devoirs pour se livrer à un amour criminel. De ce moment, elles ont tout sacrifié. Ce supplice est juste, mais l'idée seule en fait frémir. Que m'importe, après tout ? pourquoi m'occuperais‑je d'elles ou de vous ? de quel droit venez-vous troubler ma tranquillité ? Laissez-moi, Monsieur, laissez-moi, ne me voyez plus, ne m'écrivez plus, je vous en prie ; je l'exige. Cette Lettre est la dernière que vous recevrez de moi.
De …, ce 5 septembre 17**.
Evaluation de fin de séquence: essai
Essai de littérature
La parole est-elle, comme l'écrit Jean-Paul SARTRE dans Qu'est-ce que la littérature?, "un pistolet chargé"?
Essai de philosophie
Toute parole est-elle bonne à dire?
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